C’était prévisible et c’était même prévu. Les deux
premières mesures qui ressortent du Grand débat (à plus 30 %) sont celles qui vont plomber encore plus le budget de l’Etat : réindexation des retraites sur l’inflation, la baisse
de la TVA sur certains produits. Plus de prestations et moins d’impôt. Les
autres réponses (20 à 30%) ciblent les supposés « ennemis du peuple » : les entreprises
(augmenter le smic), les députés (réduire leur nombre), les riches
(rétablissement de l’ISF), les assistés (lutter contre la fraude aux aides,
contreparties du RSA). En dessous de 20%, des mesures chocs : vote
obligatoire, vote blanc, quotas d’immigration, RIC, limitation de vitesse,
…
Le schéma des réponses est emblématique de l'esprit français. Quand on en appelle
à la société civile, 1) elle exige plus d’Etat, et surtout qu’il grossisse et
maigrisse à la fois ! ; 2) elle cible tous les éléments qui la divisent.
La grande difficulté sera de retrouver du commun dans cette
fragmentation, c’est-à-dire à la fois le sens de l’intérêt général et celui des réalités ; 3) Elle préfère souvent les symboles (ISF), voire les gadgets (vote blanc) à l'efficacité.
A tous ceux qui attendent une réponse à ce Grand débat, il
faut se préparer à une Grande déception, car il n’y a pas de réponse possible à cet ensemble de revendications.
Tout au plus, peut-on espérer la mise en place de plusieurs
chantiers, mais qui devront tous
avoir en tête (ce sera la responsabilité du politique) le dramatique endettement de la France. Cela même qui lui ôte
aujourd’hui toute espèce de marge de manœuvre d’envergure. On peut manifester
pour le climat (qui est contre ?), contre les inégalités (qui est pour ?),
mais sans les instruments et le budget pour affronter ces enjeux, cela ne
restera que de l’incantation !
Mais le débat a eu une vertu que tous ces résultats bruts ne doivent pas nous faire méconnaître : dans la confrontation, on apprend la complexité, on perçoit les désaccords, on mesure les difficultés. Donc, il ne faudrait pas considérer le Grand débat national à la seule aune de ces « solutions ». Ni d'ailleurs à celle des décisions sur lesquelles il débouchera … ou non.
Mais le débat a eu une vertu que tous ces résultats bruts ne doivent pas nous faire méconnaître : dans la confrontation, on apprend la complexité, on perçoit les désaccords, on mesure les difficultés. Donc, il ne faudrait pas considérer le Grand débat national à la seule aune de ces « solutions ». Ni d'ailleurs à celle des décisions sur lesquelles il débouchera … ou non.
"Grand débat" me semble un terme impropre. Il s'est agi en réalité d'une "grande consultation". Un débat, ça implique un échange d'idées, une recherche de compromis ou de la meilleure décision possible, arguments contre arguments. Comment la société civile aurait-elle pu participer à un "grand débat" ? Par (votre) définition, les débats, ça se passe dans l'"espace public", là où se font et se défont les opinions, donc au café du commerce et sur les plateaux télé. Ce n'est pas en remplissant un questionnaire sur internet ou en déposant une contribution écrite en mairie qu'on participe à un débat. Ça s'appelle donner sa position, laisser une trace, pas débattre.
RépondreSupprimerLe résultat est une photographie de l'état de l'opinion, comme un grand sondage. Aucune réponse ne peut naturellement en sortir, sinon elle serait apparue depuis longtemps. Non ?
Votre remarque me conduit à modifier un peu la fin de ce texte qui, en le relisant, me semble excessivement négatif. Que pensez-vous de cette pondération ?
RépondreSupprimerAh ! Je suis contente de retrouver votre côté optimiste, qui en effet ne transparaissait guère dans la version précédente.
SupprimerIl n'en reste pas moins que la confrontation, qui en effet apprend beaucoup, n'est pas allée, me semble-t-il, au-delà de la peinture du profil complexe de l'opinion française. L'idéal serait sans-doute que les acteurs des prochains véritables débats intègrent explicitement cette peinture brute dans leurs argumentations.