Certaines personnes, à la lecture de Comment gouverner un peuple-roi ?, me font le reproche (ou, d'autres, l’éloge)
d’être un conservateur. Parce que je suis critique à l’égard des innovations
démocratiques à la mode (budget participatif, tirage au sort, RIC, prise en
compte du vote blanc, open gov., …),
je refuserais toute espèce de progrès et la nécessaire adaptation de la
démocratie à la modernité ! Par pur mauvais esprit, j’aurais bien aimé «
assumer » ce reproche (ou accepter le compliment), tant ce « progressisme-là
» me semble illusoire et parfois naïvement « solutionniste », mais ce ne serait pas juste pour une raison très
simple. Pour être conservateur, il faut qu’il y ait quelque chose à conserver. Or,
la démocratie n’a jamais été parfaite et son modèle idéal n’a jamais existé. Ce
que je refuse, ce sont les innovations qui, sur la base d’un diagnostic erroné
(la crise de la représentation) visent à dénaturer l’esprit de la démocratie représentative au profit d’une démocratie
radicale, directe, participative, autogestionnaire qui, hostile au kratos, en vient aussi à oublier le demos, pour aggraver de manière irrémédiable la dépossession
démocratique.
A l’inverse de cette vision, il me semble que la démocratie
doit s’inventer en se rapprochant (assymptotiquement) de son véritable esprit.
Il lui faut
• des élections qui
autorisent le pouvoir (et ne cherchent pas à le nier dès qu’elles ont élu)
;
• une délibération qui facilite et
permet la décision (et non l’empêche, par un bavardage permanent) ;
• une
décision qui serait enfin perçue par les citoyens, non comme une abjecte violence
faite à leur liberté individuelle, mais comme sa condition ;
• une reddition
des comptes qui échappe au présentisme, à l’urgentisme et au délire « transparentiste
» de l’information en continu.
La démocratie est un horizon ; et ce qu’il
s’agit de converser n’est que la possibilité de s’en rapprocher à l’infini, au
lieu de lui tourner le dos, … définitivement. Il faut donc conserver la possibilité d'un progrès !
Bravo, une fois de plus, pour la clarté de la démonstration. Espérons, néanmoins, que cette "possibilité d'un progrès" n'est pas aussi illusoire que la "possibilité d'une île" dans le roman de Houellebecq :-)
RépondreSupprimerCher Pierre-Henri
RépondreSupprimerL'urgence a peut-être nécessité d’affirmer qu’il ne fallait pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Les reproches qui te sont adressés mais surtout l’intérêt de ton livre, créent chez ton lecteur l’envie d’un second volume sur les améliorations nécessaires à l’exercice de la démocratie.
Amitiés
Marc-André
• des élections qui autorisent le pouvoir (et ne cherchent pas à le nier dès qu’elles ont élu)
RépondreSupprimerOui , c'est bien de cela dont il s'agit .
Le groupe parlementaire actuel - mais c'était à peu près pareil pour la législature précédente - représente , au premier tour , 28 % des votants , ce qui , avec 50% d'abstention , signifie que 14 % des inscrits sont représentés par 70 % des députés .
Comment , dans ces conditions , s'étonner que les 86% - ou les 72 % si on ne retient que les votants - ne s'estiment pas représentés par cette pléthore de députés?
Dans les pays du nord de l'Europe les gouvernements sont issus d'une coalition , constituées après des discussions de fond , parfois longues , amenant à des " contrats de gouvernement " , cela fait sans doute partie des raisons pour lesquels ils sont mieux acceptés par les populations .
Je me trompe ?
En tous cas merci pour votre participation précieuse au débat démocratique .
Bien cordialement
Georges