mercredi 23 juillet 2014

Préjugés sur la Croissance (Piketty suite).

Le chapitre 2 est consacré à la question de la croissance, tant de la population que de la production par habitant (PIB). Elle est cruciale quand on parle des inégalités, car une forte croissance démographique ou du PIB a un rôle « égalisateur » : la première diminue l’importance des patrimoines issus du passé (de l’héritage) tandis que la seconde favorise le travail au détriment des patrimoines accumulés. Donc la croissance est un élément clé dans la réduction des inégalités. Or, de ce point de vue, il faut déchanter, car, loin des idées reçues, une croissance annuelle forte est tout à fait exceptionnelle dans l’histoire et dans la géographie : elle concerne l’Europe des Trente glorieuses et le rattrapage actuel des pays dit émergents. En revanche dans l’histoire, la norme est une croissance très lente : celle de la population a décollé au XVIIIe siècle et celle du PIB mondial a été en moyenne de 1,6% entre 1700 et 2012.
Encore faut-il percevoir qu’une croissance dite faible (soit 1%) sur 30 ans plus représente un changement colossal de la population ou de la richesse : c’est l’effet de « croissance cumulée ».
C’est cette idée qui va nourrir la thèse à venir de Piketty : « un écart en apparence limité entre le taux de rendement du capital et le taux de croissance peut produire à long terme des effets extrêmement puissants et déstabilisants sur la structure économique des inégalités dans une société donnée » (p. 131).
Les prévisions concernant cette croissance sont donc à utiliser de manière fine. Du côté de la démographie, c’est à un retour vers une croissance faible qu’il faut s’attendre selon le « scénario central » de l’ONU : baisse de la croissance démographique de 1,2% aujourd’hui à 0,8% en 2070/2100 ; baisse de la croissance économique, ou plutôt retour à un état normal de croissance qui a toujours été de 1% à 1,5% annuel (ce qui, encore une fois, est remarquable sur le long terme). Une société où la croissance est de 0,1% se reproduit à l’identique tandis qu’un taux de 1% garantit de profonds changements (p. 160).
            A ce portrait de la croissance Piketty ajoute une indication sur la stabilité des prix : la lecture des romans du XIXe montre que celle-ci était totale (Jane Austen, Balzac, …) et que l’on pouvait s’y référer comme une valeur sûre et immuable. Tout change avec le XXe qui invente l’inflation : c’est la fin des repères monétaires stables.

            Après ces apéritifs, nous attaquons les choses sérieuses et la deuxième partie qui porte sur « La dynamique du rapport capital/revenu »


… à suivre

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