Le
chapitre 4 « De la vieille Europe au Nouveau Monde » élargit l’approche
historique de la structure du capital à l’Allemagne et à l’Amérique du Nord.
Cela permet de faire une synthèse de la grille de lecture adoptée par Piketty.
Le
premier regard, le plus ample, examine la composition du capital : les
deux grandes évolutions des pays développés est que 1) les terres agricoles ont
été remplacées par le capital immobilier, industriel et financier ; et 2)
le rapport capital/revenu s’est effondré après 1914 et n’a cessé d’augmenter
après 1945 pour atteindre le niveau de 1914.
Le
second regard s’approche des éléments de ce capital et de leurs liens : 1)
Quelle est le part des actifs étrangers ? Très importante pour les
puissances coloniales, elle s’amenuise ensuite sauf pour l’Allemagne pour qui
elle représente aujourd’hui 50% de revenu national. 2) Deuxième élément : le
capital public et la dette publique ; 3) Troisième élément : Le
capital privé, c’est-à-dire la richesse patrimoniale des individus, qui, elle
aussi, suit un courbe en U.
La
guerre de 14 explique, pour l’Europe, la chute du rapport capital/revenu par
l’effet cumulé des destructions, des chocs budgétaires, des troubles financiers
(le fameux emprunt russe, la nationalisation du canal de Suez). C’est la fin
des rentiers.
En
Amérique du Nord, les chocs du XXe siècle ont moins d’effets, ce qui fait que
le rapport entre capital nationale et revenu national est beaucoup plus stable.
Parmi
les autres enseignements du chapitre, je note :
• «
Le pays qui a le plus massivement utilisé l’inflation pour se débarrasser de
ses dettes au XXe siècle – L’Allemagne — ne veut pas entendre parler d’une
hausse des prix supérieurs à 2% par an ; le pays qui a toujours remboursé
ses dettes publiques, y compris au-delà du raisonnable — le RU —, a une
attitude plus souple et ne voit pas de mal à ce que sa banque centrale achète
une bonne part de sa dette publique et laisse légèrement filer l’inflation »
(p. 227)
• L’analyse
sur le poids du « capital esclavage » aux Etats-Unis (p. 250 sq.) : «
On constate que la valeur totale des esclaves était de près d’une année et
demie de revenu national aux Etats-Unis à la fin du XVIIIe et pendant la
première moitié du XIXe, c’est-à-dire approximativement autant que la valeur
des terres agricoles » (p. 251). Piketty voit dans le phénomène la source de l’ambivalence
américaine : d’un côté une promesse égalitaire et un espoir considérable
placé dans cette terre d’opportunités ; de l’autre, une forme extrêmement
brutale d’inégalité, notamment autour de la question raciale (p. 254).
Petite réserve de lecture en passant, sur la structure de détail du livre qui n'articule pas assez à mon goût les analyses. Le fil chronologique d'ensemble est clair, mais Piketty juxtapose ensuite des fiches d'analyse. Bref, petit défaut architectonique.
à suivre …
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