mardi 22 janvier 2019

La campagne électorale permanente

En 1958, François Mitterrand critiquait la Constitution de la Ve République au motif qu'elle instaurait, selon lui, le « Coup d'Etat permanent ». La figure monarchique du nouveau Président lui paraissait incarner cette hypertrophie d'un pouvoir, dans lequel il saura pourtant, moins de trente ans plus tard, parfaitement se glisser.
Mais il n'avait pas perçu cet autre risque qui pointe aujourd'hui : celui de la campagne électorale permanente. La dernière campagne en a été un exemple frappant avec une séquence de plus de dix mois (de septembre 2016 à juin 2017) : les primaires à droite (novembre 2016), à gauche (janvier 2017), l'élection présidentielle (mai 2018), puis législative (juin 2018). Durant cette phase, la République fut comme en suspend, repoussant toutes les décisions, passionnée par les rebondissements des multiples saisons de la série.
Une fois le président installé, doté d'une majorité confortable, un train de réformes s'est « mis en marche ». Mais il est stoppé, un an et demi après, par l'exigence d'une nouvelle quasi campagne. C'est le Grand Débat. Et il est à craindre (pour moi) que la principale revendication qui en sorte — parce qu'elle est floue, parce qu'elle semble sympathique, parce qu'elle facile à réaliser — soit le désormais fameux RIC, référendum d'initiative populaire.

Mais ses partisans perçoivent-ils vraiment que, s'il était instauré, au lieu de l'action, des réformes et des décisions qui sont tellement urgentes, notre régime activerait la campagne en mode continu ? Elle en perdrait son sens, car une campagne est un moment où les citoyens prennent le temps de faire collectivement le point sur le chemin parcouru et sur les objectifs d'avenir ; elle est aussi le moment où les responsables rendent des comptes. Faire le point à tout instant et rendre des comptes à chaque seconde : on est d'accord que ce ne sont pas les meilleures façons d'avancer … ?

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