jeudi 15 mai 2014

Les idéologies après la fin des idéologies (1/5)


            Entre 1989, 2001 ou 2011 : que choisir ? Quelle année méritera de figurer au démarrage du XXIe siècle dans les futurs manuels d’histoire. 1989 a de nombreuses vertus : la chute du mur, le basculement de l’Est dans l’Ouest, la dramatique débâcle de conflits jusqu’ici congelés, bref la fin d’une séquence inaugurée en 1914 qui fait du XXe siècle une tragédie sans équivalent, mais un siècle heureusement écourté : seulement 75 ans ! Mais 1989 a aussi l’inconvénient de clore sans rien inaugurer ou alors seulement, comme le pronostiquait Francis Fukuyama, l’ère de la « fin de l’histoire », même si celle-ci peut paraître — après-coup — bien mouvementée. Insatisfait, on se tournera alors vers 2001 qui semble s’imposer. L’année est très proche du commencement numérique ; elle est spectaculaire, dramatique et inédite avec la destruction des Twin towers ; elle offre donc une inauguration pleine de sens et d’horizons tragiques. Mais voilà que 2011, qui n’est pas encore achevée, vient lui faire une redoutable concurrence. D’abord, les révolutions arabes (Tunisie, Egypte, Yemen, Bahrein, Lybie, Syrie), qui ont mis à bas des dictateurs avec un même slogan aussi rustique qu’efficace : « dégage » ! Ensuite, le tsunami japonais et la catastrophe de Fukushima, qui sonnent comme un prélude aux catastrophes environnementale à venir. Enfin la crise économique qui, avec la menace des dettes souveraines, semble plonger le capitalisme financier dans un gouffre sans fond ni fonds. Avec de tels événements, dont les prolongements sont incertains, la fin d’Ousama Ben Laden pourrait presque paraître anecdotique, neutralisant du même coup la portée historico-mondiale du 11 septembre.
Ce ne sont là, bien sûr, que des conjectures ; et il faut accepter de laisser la question ouverte, tant nous manquons de recul pour y répondre. Mais dans cette incertitude sur les grandes césures du temps se niche aussi notre désarroi sur le cours des idées et des grands courants de pensée. Pour le dire d’un mot : 1989 semblait clore une époque, celle du règne sans partage des idéologies guerrières et totales. Vingt deux ans plus tard, il faut reprendre la question : quelles sont les idéologies d’après « la fin des idéologies » ?

Pierre-Henri Tavoillot

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